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| 04-04-2017 14:20
Des spécialistes ont rappelé leur rôle samedi, à l’occasion de la journée de sensibilisation sur la maladie.
Un garçon de 16 ans, enfermé et enchainé dans une chambre de la maison paternelle depuis ses 8 ans, âge auquel il a été diagnostiqué autiste. Ce témoignage de l’orthophoniste Mao Ma Souhé est un contre-exemple parfait de ce qui est attendu d’un parent d’enfant autiste. Parents qui ont été entretenus samedi 1er avril 2017 à Douala par des spécialistes lors d’une conférence, à l’occasion de la journée mondiale de sensibilisation sur l’autisme, qui se célébrait le lendemain 2 avril. Il était donc question lors de cette rencontre organisée par l’association l’Emotion de l’autisme, de revenir sur le thème choisi par l’Organisation mondiale de la Santé (Oms) cette année : « Vers l’autonomie et l’autodétermination ».
Comme spécialistes, Carrol Kamwe, psychologue clinicienne et Mao Ma Souhé, psycho-orthophoniste. La première, parlant de l’autisme, a déclaré : « La bonne nouvelle, c’est que c’est quelque chose qui peut être modifié par les thérapies éducatives ». Elle a par ailleurs rappelé aux parents : « Il y a un travail qui doit être fait quotidiennement à la maison pour accompagner ce qui se fait dans un centre spécialisé. » Mao Ma Souhé de son côté a défini l’autisme comme « un trouble neurocomportemental qui affecte de façon sévère le développement et en particulier la communication et le comportement de la personne. » Il a insisté sur un fait : « L’autiste n’est pas une personne anormale, plutôt neuro-atypique. C’est un peu comme un étranger qui arrive dans une contrée et qui n’en comprend pas les us et les coutumes.»
Mao Ma Souhé est revenu d’abord sur les différents spécialistes qui interviennent dans le diagnostic et la prise en charge de l’enfant neuro-atypique. Ensuite sur le rôle de l’orthophoniste qui est d’intervenir sur le langage, l’un des axes pour combattre l’autisme avec le comportement et les interactions sociales. Et comme la psychologue, il a insisté sur le rôle des parents, qui sont des co-thérapeutes. Parmi ces parents, M. Ngomsi, père d’un autiste de 9 ans, qui est en train de perdre l’autonomie qu’il avait déjà gagnée. Il a pu s’entretenir avec l’orthophoniste et est reparti avec les contacts des spécialistes.
Danielle Minyemeck: « Nous devons partager les expériences locales »
Promotrice de l’association Emotion de l’autisme
Quel constat a conduit à la création de l’association et donc du site ?
Tout est parti d’un manque d’informations. En tant que parent d’enfant autiste, je me suis retrouvée avec des difficultés. Il faut faire soi-même des recherches pour avoir la bonne information. C’est avec beaucoup de chance que vous tombez sur le bon spécialiste et le bon diagnostic. Donc, étant donné que nous sommes passés par là, il faudrait rassembler ces informations, mettre en place cet itinéraire définitivement, pour que les gens puissent suivre le bon circuit de façon automatique en termes de dépistage, de prise en charge. Les bons spécialistes sont là, ils peuvent nous aider. Et le site autismeafrique.org est donc une plateforme pour sensibiliser sur l’autisme en fournissant des informations contextuelles, des expériences d’ici. C’est-à-dire celles concernant les Africains, les Camerounais sur le vécu avec l’autisme. L’autisme reste une autre façon d’exister.
Pensez-vous toucher assez de personnes à travers le site ?
Oui. Il y a toujours une personne qui nous contacte, qui veut travailler avec nous. Il y a des parents qui disent merci pour les informations. Des proches d’enfants autistes qui reconnaissent les symptômes à travers des explications, des médecins qui demandent qu’on les contacte via le site, etc. Une particularité : on a beaucoup plus touché les parents d’enfants non autistes, qui ne savaient pas ce que c’était. Le volet sensibilisation est très important car, pendant longtemps, on s’est dit que ce soit des histoires de sorcellerie, qui n’arrivent qu’aux autres. Et ça permet maintenant de poser un autre regard sur ces enfants-là. Et de pouvoir les intégrer sans avoir de la méfiance à leur égard. Le site, permet aussi de valoriser les métiers liés à cette pathologie, psychomotricien, ergothérapeute, etc. Ils font un travail excellent.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez sur le terrain ?
Principalement l’accès à l’information. Les informations sur l’autisme au Cameroun, les statistiques ne sont pas à jour. Pourtant, il y a eu des travaux, des rencontres sur la maladie. Où sont les documents qui ont été produits ? Où sont les chiffres ? On ne les voit pas. On doit à la fin rédiger des rapports. Est-ce qu’il y a des centres pour autistes à Buea, à Bertoua ? Il faut des informations sur le terrain. L’autre difficulté est financière. Tous ces efforts ont un coût. Les activités d’éveil qu’il faut pouvoir faire, le suivi, ça a un coût. Et dans un contexte où il n’y a pas de sécurité sociale, pas d’accompagnement, ça reste compliqué.